Dans un environnement industriel de plus en plus compétitif, la performance des machines est devenue un enjeu stratégique majeur. Optimiser le rendement des équipements permet d'accroître la productivité tout en réduisant les coûts d'exploitation. La mesure précise de cette performance repose sur l'utilisation d'indicateurs pertinents, capables de fournir une vision complète et objective du fonctionnement des machines. Ces métriques constituent de véritables outils d'aide à la décision pour les responsables de production et de maintenance, leur permettant d'identifier rapidement les dysfonctionnements et d'engager les actions correctives appropriées. Le pilotage efficace d'un parc machine nécessite la mise en place d'un tableau de bord composé d'indicateurs complémentaires, couvrant aussi bien les aspects techniques qu'économiques. Au-delà des données brutes de production, il est essentiel de surveiller la disponibilité des équipements, leur performance énergétique et la qualité des pièces produites. L'avènement de l'industrie 4.0 a considérablement facilité la collecte et l'analyse de ces informations, grâce à des capteurs connectés et des systèmes de supervision intégrés qui permettent un suivi en temps réel.
Les indicateurs de performance clés (KPIs) pour machines industrielles
L'évaluation objective de la performance d'une machine industrielle repose sur plusieurs familles d'indicateurs. Les KPIs (Key Performance Indicators) constituent l'épine dorsale de cette démarche et doivent être soigneusement sélectionnés en fonction des spécificités du processus de production et des objectifs stratégiques de l'entreprise. Un KPI pertinent doit être mesurable , actionnable et directement lié aux performances opérationnelles .
Parmi les indicateurs les plus communément utilisés, on retrouve les taux de production, qui mesurent le volume de pièces fabriquées par unité de temps, les taux de disponibilité, qui évaluent le temps pendant lequel la machine est effectivement en fonctionnement, et les taux de qualité, qui quantifient la proportion de pièces conformes. Ces métriques fondamentales permettent d'obtenir une première vision globale de l'efficacité des équipements.
D'autres indicateurs plus spécifiques peuvent compléter ce tableau de bord, comme le temps moyen entre deux pannes (MTBF), le temps moyen de réparation (MTTR), ou encore le taux de rendement global (TRG). La combinaison judicieuse de ces différentes métriques offre une vision multidimensionnelle de la performance des machines, facilitant ainsi l'identification des axes d'amélioration prioritaires.
La mise en place d'indicateurs de performance pertinents est la première étape vers l'excellence opérationnelle. Sans mesure précise, aucune amélioration durable n'est possible dans un environnement industriel.
Taux de rendement synthétique (TRS) et ses composantes
Le Taux de Rendement Synthétique (TRS), équivalent français de l'OEE (Overall Equipment Effectiveness), représente l'indicateur de référence pour évaluer la performance globale d'une machine industrielle. Ce KPI synthétique mesure l'efficacité réelle d'un équipement par rapport à son potentiel théorique maximal. Il prend en compte trois dimensions fondamentales : la disponibilité (le temps pendant lequel la machine est effectivement en fonctionnement), la performance (la vitesse à laquelle elle travaille) et la qualité (la proportion de pièces conformes).
Le TRS s'exprime sous forme d'un pourcentage, calculé en multipliant ces trois taux. Un TRS de 100% signifierait que la machine fonctionne en permanence, à sa vitesse nominale maximale, et ne produit que des pièces parfaites. Dans la réalité industrielle, un TRS de 85% est généralement considéré comme excellent, tandis qu'un taux inférieur à 60% révèle un potentiel d'amélioration significatif.
L'intérêt majeur du TRS réside dans sa capacité à refléter l'impact combiné de tous les facteurs affectant la productivité, qu'il s'agisse de pannes, de réglages, de micro-arrêts, de ralentissements ou de défauts qualité. Il constitue ainsi un puissant levier d'amélioration continue, permettant de quantifier précisément les gains potentiels et de mesurer l'efficacité des actions correctrices mises en œuvre.
Calcul du TRS selon la norme ISO 22400
La norme internationale ISO 22400, relative aux indicateurs clés de performance pour le management des opérations de fabrication, définit précisément la méthodologie de calcul du TRS. Cette standardisation garantit une cohérence dans l'évaluation de la performance des équipements, facilitant ainsi les comparaisons entre différentes lignes de production ou différents sites industriels.
Selon cette norme, le TRS se calcule en multipliant les trois taux fondamentaux : Disponibilité × Performance × Qualité. Chacun de ces taux possède sa propre formule de calcul :
- Taux de Disponibilité = Temps de fonctionnement / Temps d'ouverture
- Taux de Performance = (Quantité produite × Temps de cycle théorique) / Temps de fonctionnement
- Taux de Qualité = Quantité de pièces bonnes / Quantité totale produite
Pour une application rigoureuse, il est essentiel de définir clairement les différentes catégories de temps utilisées dans ces calculs. Le temps d'ouverture correspond à la période durant laquelle la production est planifiée. Le temps de fonctionnement représente le temps d'ouverture diminué des temps d'arrêt (pannes, changements de série, réglages, etc.). Le temps de cycle théorique désigne la durée nécessaire pour produire une pièce dans des conditions optimales.
Analyse des temps d'arrêt avec le diagramme de pareto
L'optimisation du TRS passe inévitablement par une analyse approfondie des temps d'arrêt, qui constituent souvent le principal gisement d'amélioration. Le diagramme de Pareto, basé sur le principe des 80/20 (80% des effets sont généralement dus à 20% des causes), représente un outil particulièrement efficace pour hiérarchiser les problèmes à résoudre.
Pour construire ce diagramme, il convient d'abord de catégoriser précisément les différents types d'arrêts (pannes mécaniques, pannes électriques, changements d'outils, réglages, attentes matières, etc.) et de quantifier leur durée cumulée sur une période représentative. Ces données sont ensuite représentées sous forme d'un histogramme décroissant, complété par une courbe cumulative qui permet d'identifier rapidement les causes les plus pénalisantes.
Cette visualisation facilite l'identification des "vital few" – les quelques causes qui engendrent la majorité des temps d'arrêt – et permet ainsi de concentrer les efforts d'amélioration sur les problèmes les plus impactants. Par exemple, dans une ligne d'embouteillage, l'analyse pourrait révéler que les pannes de l'étiqueteuse représentent à elles seules 40% du temps d'arrêt total, constituant ainsi une priorité d'action évidente.
Taux de disponibilité et MTBF (mean time between failures)
Le taux de disponibilité, première composante du TRS, évalue la proportion du temps planifié pendant laquelle la machine est effectivement en état de produire. Il est directement influencé par les arrêts, qu'ils soient planifiés (changements de série, maintenance préventive) ou non planifiés (pannes, incidents).
Pour approfondir l'analyse de la disponibilité, le MTBF (Mean Time Between Failures, ou temps moyen entre deux défaillances) constitue un indicateur complémentaire essentiel. Exprimé en heures, il mesure l'intervalle moyen entre deux pannes consécutives et reflète ainsi la fiabilité intrinsèque de l'équipement. Un MTBF élevé indique une machine robuste, nécessitant peu d'interventions correctives.
La formule de calcul du MTBF est la suivante : MTBF = Temps total de fonctionnement / Nombre de pannes. Par exemple, si une presse à injection a fonctionné pendant 800 heures et a subi 4 pannes durant cette période, son MTBF est de 200 heures. Ce chiffre peut ensuite être comparé aux références du secteur ou à l'historique de la machine pour évaluer sa fiabilité relative.
Taux de performance et vitesse nominale
Le taux de performance mesure la capacité de la machine à fonctionner à sa vitesse théorique optimale. Il met en évidence les pertes de vitesse dues aux micro-arrêts, aux ralentissements ou aux cadences réduites volontairement par les opérateurs. Dans de nombreuses industries, ces pertes de vitesse représentent un gisement d'amélioration considérable, souvent sous-estimé par rapport aux pannes plus visibles.
Le calcul du taux de performance nécessite de connaître précisément la vitesse nominale de la machine, c'est-à-dire le nombre de pièces qu'elle devrait théoriquement produire par unité de temps dans des conditions optimales. Cette référence est généralement fournie par le constructeur, mais peut aussi être déterminée empiriquement en observant les meilleures performances historiques de l'équipement.
Plusieurs facteurs peuvent affecter négativement le taux de performance : usure des composants mécaniques, qualité variable des matières premières, manque d'expertise des opérateurs, ou encore paramètres de production non optimisés. L'analyse détaillée de ces facteurs, notamment via des enregistrements de cadence en temps réel, permet d'identifier les leviers d'amélioration prioritaires.
Taux de qualité et gestion des rebuts
Le taux de qualité, troisième composante du TRS, évalue la proportion de pièces conformes parmi l'ensemble des pièces produites. Il prend en compte à la fois les rebuts (pièces définitivement écartées) et les retouches (pièces nécessitant une intervention supplémentaire pour être rendues conformes).
L'optimisation de ce taux passe par une gestion rigoureuse des rebuts, impliquant leur quantification précise et l'analyse systématique de leurs causes. Chaque type de défaut doit être répertorié et quantifié, idéalement via un système de traçabilité permettant de relier chaque non-conformité à des paramètres de production spécifiques (température, pression, vitesse, etc.).
Les techniques de contrôle statistique des processus (SPC) offrent des outils puissants pour surveiller en temps réel les dérives qualité et intervenir avant l'apparition de rebuts. Le calcul des indicateurs de capabilité ( Cp
et Cpk
) permet également d'évaluer l'aptitude intrinsèque du processus à respecter les tolérances exigées, facilitant ainsi l'identification des équipements critiques nécessitant une attention particulière.
Monitoring de la consommation énergétique
La consommation énergétique représente une part croissante des coûts d'exploitation des machines industrielles, et constitue donc un axe majeur d'optimisation de la performance. Au-delà de l'aspect purement économique, la maîtrise de cette consommation répond également à des enjeux environnementaux de plus en plus pressants, notamment dans le contexte de la transition énergétique et de la réduction des émissions de gaz à effet de serre.
Le monitoring précis de la consommation énergétique permet d'identifier les gisements d'économie potentiels, qu'il s'agisse d'équipements énergivores, de périodes de surconsommation ou de paramètres de fonctionnement non optimisés. Cette démarche s'appuie sur des capteurs spécifiques (wattmètres, débitmètres, thermocouples, etc.) connectés à des systèmes d'acquisition et d'analyse de données en temps réel.
L'établissement d'une cartographie énergétique détaillée constitue généralement la première étape de cette optimisation. Elle permet de hiérarchiser les actions en fonction de leur rapport coût/bénéfice et d'élaborer un plan d'amélioration structuré, pouvant inclure des modifications techniques (isolation, récupération de chaleur, variateurs de vitesse, etc.) ou des ajustements opérationnels (paramètres de production, planification, etc.).
Mesure de la consommation électrique avec les systèmes SCADA
Les systèmes SCADA (Supervisory Control And Data Acquisition) représentent une solution privilégiée pour le monitoring énergétique des machines industrielles. Ces plateformes de supervision centralisent les données issues de multiples capteurs répartis sur les équipements et offrent des fonctionnalités avancées de visualisation, d'analyse et d'alerte.
L'intégration de wattmètres numériques dans l'architecture SCADA permet un suivi en temps réel de la consommation électrique, avec une granularité pouvant descendre jusqu'au niveau des composants individuels (moteurs, résistances chauffantes, systèmes hydrauliques, etc.). Ces données peuvent ensuite être corrélées avec les paramètres de production pour identifier les configurations les plus efficientes énergétiquement.
Les systèmes SCADA modernes offrent également des fonctionnalités d'historisation longue durée, facilitant l'analyse des tendances et la détection des dérives progressives. Ils permettent en outre de mettre en place des alertes automatiques en cas de dépassement de seuils de consommation prédéfinis, contribuant ainsi à une gestion proactive de l'énergie au sein de l'atelier.
Ratio kwh par unité produite
Parmi les indicateurs énergétiques les plus pertinents figure le ratio de consommation électrique par unité produite, généralement exprimé en kilowattheures par pièce (kWh/unité). Cette métrique permet de normaliser la consommation énergétique par rapport au volume de production, facilitant ainsi les comparaisons entre différentes périodes ou différents équipements.
Le calcul de ce ratio nécessite d'une part la mesure précise de l'énergie consommée sur une période donnée, et d'autre part le comptage fiable des unités produites durant cette même période. La formule est simple : Ratio = Consommation totale (kWh) / Nombre d'unités produites. Un ratio stable indique un processus énergétiquement maîtrisé, tandis qu'une augmentation peut signaler des dérives nécessitant une analyse approfondie.
Ce ratio peut également être segmenté par phase du processus de production, permettant d'identifier les étapes les plus énergivores. Par exemple, dans une ligne d'extrusion plastique, le chauffage de la matière représente généralement la part prépondérante de la consommation. Une analyse ciblée de cette phase permettra donc d'identifier les leviers d'optimisation les plus pertinents, comme l'amélioration de l'isolation thermique ou l'ajustement plus fin des températures de consigne.
L'établissement de valeurs de référence (benchmarks) pour ce ratio, spécifiques à chaque type de produit et d'équipement, constitue un préalable indispensable à toute démarche d'optimisation énergétique. Ces références permettront de définir des objectifs de performance réalistes et de mesurer précisément les progrès réalisés.
Analyse thermographique et détection des pertes énergétiques
L'analyse thermographique, réalisée à l'aide de caméras infrarouges, permet de visualiser les zones de déperdition thermique sur les machines industrielles. Cette technique non invasive révèle immédiatement les défauts d'isolation, les fuites de vapeur, les surchauffes anormales ou les déséquilibres thermiques qui peuvent passer inaperçus lors d'inspections visuelles classiques.
Les images thermiques capturées sont analysées selon un code couleur intuitif, où les zones les plus chaudes apparaissent généralement en rouge ou blanc, et les zones plus froides en bleu ou noir. Cette visualisation facilite l'identification des points critiques nécessitant une intervention prioritaire. Par exemple, une température anormalement élevée sur un palier peut indiquer un début d'usure nécessitant une lubrification ou un remplacement préventif.
Au-delà de la détection des anomalies, l'analyse thermographique périodique permet d'établir une cartographie thermique de référence pour chaque machine. Les écarts par rapport à cette référence constituent alors des indicateurs précoces de dysfonctionnement, permettant d'intervenir avant que les problèmes n'affectent la performance énergétique ou n'entraînent des arrêts non planifiés.
Suivi des pics de consommation avec les compteurs intelligents
Les pics de consommation énergétique représentent un enjeu économique majeur pour les industriels, car ils déterminent souvent la puissance souscrite auprès du fournisseur d'énergie et peuvent entraîner des pénalités financières significatives. Les compteurs intelligents (smart meters) permettent de surveiller en temps réel la consommation électrique et d'identifier précisément ces pics, tant en termes d'amplitude que de temporalité.
L'analyse fine de ces données permet de mettre en place des stratégies d'écrêtage, visant à répartir plus uniformément la consommation dans le temps. Ces stratégies peuvent inclure le décalage des démarrages de machines énergivores, l'échelonnement des cycles de chauffe, ou encore la mise en place de systèmes de stockage d'énergie tampon pour absorber les appels de puissance transitoires.
Les compteurs intelligents facilitent également la détection des consommations résiduelles en période d'inactivité (nuits, week-ends), révélant d'éventuels équipements laissés inutilement sous tension. Ces "vampires énergétiques" peuvent représenter jusqu'à 10% de la consommation totale dans certaines installations industrielles, constituant ainsi un gisement d'économie non négligeable et facilement exploitable.
Indicateurs de maintenance prédictive
La maintenance prédictive représente une évolution majeure dans la gestion des équipements industriels, permettant de passer d'une logique réactive (intervention après panne) ou systématique (interventions à intervalles fixes) à une approche basée sur l'état réel des machines. Cette approche repose sur l'utilisation de capteurs spécifiques qui surveillent en continu les paramètres clés des équipements et détectent les signes précurseurs de défaillance avant qu'ils n'entraînent une panne.
Les indicateurs de maintenance prédictive constituent de puissants outils pour optimiser la disponibilité des machines tout en réduisant les coûts de maintenance. Ils permettent d'intervenir au moment optimal, ni trop tôt (évitant ainsi le remplacement prématuré de composants encore fonctionnels), ni trop tard (prévenant les pannes coûteuses et les arrêts non planifiés). Cette approche "juste à temps" améliore significativement le taux de disponibilité des équipements, composante essentielle du TRS.
La mise en place d'un système de maintenance prédictive nécessite non seulement l'installation de capteurs adaptés, mais aussi le développement d'algorithmes d'analyse capables d'interpréter correctement les données collectées et de générer des alertes pertinentes. L'intelligence artificielle et le machine learning jouent un rôle croissant dans ce domaine, permettant d'affiner continuellement les modèles prédictifs à partir de l'historique des pannes et interventions.
Analyse vibratoire avec capteurs piézoélectriques
L'analyse vibratoire constitue l'une des techniques les plus répandues et les plus efficaces pour la surveillance de l'état des machines tournantes (moteurs, pompes, ventilateurs, réducteurs, etc.). Elle repose sur le principe que tout défaut mécanique (déséquilibre, désalignement, usure de roulement, etc.) génère des vibrations caractéristiques, dont la détection précoce permet d'anticiper les défaillances.
Les capteurs piézoélectriques, fixés sur des points stratégiques de la machine, convertissent les vibrations mécaniques en signaux électriques qui sont ensuite analysés selon différentes méthodes (analyse spectrale, ondelettes, enveloppe, etc.). Chaque type de défaut possède une "signature vibratoire" spécifique, reconnaissable par sa fréquence, son amplitude ou sa forme d'onde. Par exemple, un défaut de bague extérieure sur un roulement générera des impulsions à une fréquence caractéristique calculable à partir des dimensions géométriques du composant.
Les systèmes modernes de surveillance vibratoire permettent non seulement de détecter l'apparition d'un défaut, mais aussi d'en suivre l'évolution dans le temps. Cette progression est généralement visualisée sous forme de courbes de tendance, facilitant l'estimation de la durée de vie résiduelle du composant et la planification optimale des interventions de maintenance.
Surveillance acoustique et détection d'anomalies sonores
Complémentaire à l'analyse vibratoire, la surveillance acoustique utilise des microphones spécialisés pour capter les sons émis par les machines en fonctionnement. Cette approche est particulièrement efficace pour détecter certains types de défauts difficilement perceptibles par d'autres méthodes, comme les fuites d'air comprimé, les cavitations dans les pompes ou les frottements anormaux.
Les techniques modernes d'analyse acoustique vont bien au-delà de la simple mesure du niveau sonore. Elles s'appuient sur des algorithmes sophistiqués de traitement du signal (filtrage, analyse spectrale, reconnaissance de formes) capables d'isoler les signatures sonores spécifiques associées à différents types de défaillances, même dans des environnements industriels bruyants. Par exemple, un algorithme peut être entraîné à reconnaître le son caractéristique d'un roulement en début d'usure, indétectable à l'oreille humaine mais révélateur d'une défaillance imminente.
Les systèmes de surveillance acoustique avancés intègrent souvent des fonctionnalités d'apprentissage automatique, leur permettant d'affiner progressivement leur capacité de détection en fonction de l'historique des anomalies observées. Cette approche "auto-apprenante" améliore continuellement la sensibilité et la spécificité des alertes générées, réduisant à la fois les faux positifs et les défaillances non détectées.
Mesures thermiques par caméras infrarouges FLIR
La thermographie infrarouge représente un outil de diagnostic puissant pour la maintenance prédictive, permettant de visualiser les distributions de température sur les équipements en fonctionnement. Les caméras infrarouges FLIR (Forward Looking InfraRed), référence dans ce domaine, capturent le rayonnement thermique émis par les surfaces et le convertissent en images colorées facilement interprétables.
Cette technique s'avère particulièrement efficace pour détecter un large éventail d'anomalies : échauffements anormaux dans les circuits électriques (connexions desserrées, surcharges), défauts d'isolation thermique, problèmes de lubrification dans les organes mécaniques, ou encore obstructions dans les circuits de refroidissement. Par exemple, un point chaud sur un tableau électrique peut révéler une connexion défectueuse bien avant qu'elle ne provoque une panne ou un incendie.
Les systèmes modernes de thermographie intègrent des fonctionnalités avancées comme la mesure précise de température en tout point de l'image, la définition de seuils d'alarme personnalisés, ou encore la superposition d'images thermiques et visuelles pour faciliter la localisation exacte des anomalies. Certaines installations industrielles optent pour des caméras infrarouges fixes, réalisant des acquisitions automatiques à intervalles réguliers et alimentant des systèmes d'analyse comparative qui détectent automatiquement les évolutions anormales de température.
Analyse des huiles et fluides avec spectromètre
L'analyse des huiles de lubrification et des fluides hydrauliques constitue une méthode particulièrement informative pour évaluer l'état interne des machines sans démontage. Comparable à une "prise de sang" pour l'équipement, elle fournit des indications précieuses sur l'usure des composants, la contamination du système ou la dégradation du lubrifiant lui-même.
L'utilisation de spectromètres (absorption atomique, émission à plasma, infrarouge) permet d'identifier et de quantifier avec précision les différents éléments présents dans l'échantillon. La détection de particules métalliques caractéristiques (fer, cuivre, aluminium, etc.) révèle l'usure spécifique de certains composants, tandis que la présence d'eau, de silice ou de carbone peut indiquer des problèmes d'étanchéité, de filtration ou de combustion incomplète. Par exemple, une augmentation soudaine de la concentration en cuivre dans l'huile d'un réducteur peut signaler une dégradation des coussinets avant toute manifestation vibratoire ou acoustique.
Au-delà de l'analyse élémentaire, la spectrométrie infrarouge permet également d'évaluer les propriétés physico-chimiques du lubrifiant (viscosité, oxydation, additivation) et de déterminer ainsi son degré de dégradation. Ces informations complètent le diagnostic d'usure et permettent d'optimiser les intervalles de vidange, contribuant à la fois à la fiabilité des équipements et à la réduction des déchets industriels.
Suivi de la qualité de production
La qualité constitue le troisième pilier du TRS, aux côtés de la disponibilité et de la performance. Son suivi rigoureux est essentiel non seulement pour satisfaire les exigences des clients, mais aussi pour optimiser le rendement global des équipements. En effet, toute pièce non conforme représente un gaspillage de ressources (matières premières, énergie, temps machine) qui impacte directement la productivité.
Le monitoring de la qualité s'appuie sur un ensemble d'indicateurs complémentaires, allant des taux de rebut aux indices de capabilité, en passant par les cartes de contrôle statistique. Ces métriques permettent non seulement de quantifier le niveau de qualité atteint, mais aussi d'identifier les causes profondes des non-conformités et de mesurer l'efficacité des actions correctives mises en œuvre.
L'avènement de l'industrie 4.0 a considérablement enrichi les possibilités en matière de contrôle qualité, avec le développement de technologies automatisées (vision industrielle, capteurs multiparamétriques, etc.) capables d'inspecter 100% de la production en temps réel. Ces systèmes non seulement détectent les défauts avec une fiabilité supérieure à celle du contrôle humain, mais génèrent également des données massives exploitables pour l'amélioration continue des processus.
Taux de non-conformité et cartes de contrôle SPC
Le taux de non-conformité, exprimé en PPM (Parties Par Million) ou en pourcentage, constitue l'indicateur le plus direct pour évaluer la qualité de production. Il mesure la proportion de pièces ne respectant pas les spécifications définies, qu'il s'agisse de caractéristiques dimensionnelles, esthétiques, fonctionnelles ou autres. Pour être pleinement exploitable, ce taux doit être segmenté par type de défaut et par référence produit, permettant ainsi d'identifier les problématiques prioritaires. Les cartes de contrôle SPC (Statistical Process Control) représentent un outil puissant pour maintenir et améliorer la qualité en production. Basées sur des principes statistiques, elles permettent de distinguer les variations normales inhérentes au processus (causes communes) des anomalies ponctuelles (causes spéciales) nécessitant une intervention. Les types de cartes les plus couramment utilisés incluent les cartes X-R (moyenne et étendue), X-S (moyenne et écart-type) et les cartes aux attributs (p, np, c, u) selon la nature des caractéristiques contrôlées. L'analyse des tendances visibles sur ces cartes de contrôle permet d'anticiper les dérives qualité avant même qu'elles ne génèrent des non-conformités. Par exemple, une série de points consécutifs s'approchant progressivement de la limite de tolérance, bien que toujours dans les spécifications, peut indiquer une usure progressive d'un outil qu'il conviendra de remplacer préventivement.
Capabilité machine (cp et cpk) selon ISO 22514
Les indices de capabilité machine, définis par la norme ISO 22514, évaluent l'aptitude intrinsèque d'un équipement à produire des pièces conformes aux spécifications. Contrairement au simple taux de non-conformité qui mesure un résultat, ces indices permettent de prédire la performance qualité potentielle du processus en comparant sa dispersion naturelle à l'intervalle de tolérance exigé.