La révolution numérique transforme profondément les modes de fonctionnement des entreprises, modifiant leur façon de produire, de communiquer et d'innover. À l'heure où la compétitivité devient un enjeu crucial, la digitalisation promet des gains substantiels en matière de productivité. Selon une étude de McKinsey, les entreprises ayant adopté des technologies numériques avancées constatent des améliorations de productivité allant de 15% à 25%. Pourtant, derrière ces chiffres impressionnants se cache une réalité plus nuancée. Le "paradoxe de la productivité" observé dans certaines organisations soulève des questions légitimes sur les conditions réelles d'efficacité de la transformation digitale.
Les promesses de la digitalisation sont nombreuses : automatisation des tâches répétitives, accélération des processus décisionnels, amélioration de la collaboration, ou encore personnalisation de l'expérience client. Mais ces bénéfices ne se concrétisent pas automatiquement. Des études récentes montrent que 70% des initiatives de transformation digitale n'atteignent pas leurs objectifs initiaux. L'écart entre potentiel théorique et résultats concrets mérite donc d'être exploré en profondeur pour comprendre comment la digitalisation peut véritablement devenir un moteur de productivité.
État actuel de la transformation numérique en entreprise
Le paysage de la transformation numérique en France présente un tableau contrasté, avec des disparités importantes selon la taille des entreprises et leur secteur d'activité. D'après l'Observatoire de la transformation digitale, 82% des grandes entreprises françaises ont engagé une stratégie de transformation numérique formalisée, contre seulement 35% des PME. Ces chiffres témoignent d'une fracture digitale persistante dans le tissu économique français, malgré les incitations gouvernementales comme le programme France Num qui vise à accélérer la numérisation des TPE/PME.
L'indice DESI (Digital Economy and Society Index) de la Commission européenne place la France au 15ème rang européen en matière de digitalisation des entreprises en 2022, une position médiane qui masque des réalités très différentes selon les secteurs économiques. Si certains domaines comme la finance ou les télécommunications affichent un niveau de maturité digitale avancé, d'autres comme le BTP ou l'artisanat accusent un retard significatif. Cette hétérogénéité constitue un défi majeur pour la compétitivité globale de l'économie française.
Taux d'adoption des technologies digitales par secteur d'activité en france
L'intégration des technologies numériques varie considérablement selon les secteurs économiques. Le secteur bancaire et assurance se distingue avec un taux d'adoption de technologies digitales avancées de 78%, suivi par les télécommunications (72%) et l'industrie pharmaceutique (67%). À l'inverse, le secteur de la construction affiche un taux de seulement 29%, tandis que l'agriculture atteint 32%. Ces écarts s'expliquent notamment par des différences structurelles, des contraintes réglementaires spécifiques et des niveaux variables de pression concurrentielle.
Le commerce de détail connaît une transformation accélérée avec un taux d'adoption qui a bondi de 38% à 61% entre 2019 et 2022, porté notamment par l'essor du e-commerce. Dans le secteur manufacturier, l'adoption progresse régulièrement (54%) mais reste confrontée à des défis d'intégration entre systèmes de production historiques et nouvelles solutions digitales. Ces disparités sectorielles influencent directement la capacité des entreprises à générer des gains de productivité par la digitalisation.
Comparaison des investissements numériques entre PME et grands groupes
L'écart d'investissement numérique entre PME et grands groupes reste considérable en France. En 2022, les grandes entreprises ont consacré en moyenne 5,8% de leur chiffre d'affaires aux technologies numériques, contre seulement 2,3% pour les PME. Ce différentiel s'explique par plusieurs facteurs : capacités financières limitées, manque de compétences internes, et difficulté à appréhender le retour sur investissement des projets digitaux pour les structures de taille modeste.
Cette disparité se reflète également dans la nature des investissements réalisés. Les grands groupes privilégient des technologies avancées comme l'intelligence artificielle (32% d'entre eux y investissent), les jumeaux numériques (28%) ou l'IoT industriel (41%). Les PME, quant à elles, concentrent leurs efforts sur des outils plus fondamentaux comme la gestion de la relation client (51%), les solutions de collaboration (47%) ou la présence en ligne (65%). Cette approche différenciée influence directement le potentiel de gains de productivité associé à ces investissements.
Type d'investissement digital | Grands groupes | PME |
---|---|---|
Intelligence artificielle | 32% | 8% |
IoT industriel | 41% | 12% |
Cloud computing | 78% | 43% |
Solutions CRM | 86% | 51% |
Présence en ligne | 95% | 65% |
Impact de la crise COVID-19 sur l'accélération digitale des organisations
La pandémie de COVID-19 a joué un rôle d'accélérateur sans précédent dans la transformation digitale des entreprises françaises. Selon une étude de Bpifrance, 57% des PME ont intensifié leurs investissements numériques durant cette période, contre seulement 22% avant la crise. Ce phénomène d'accélération a touché tous les secteurs, y compris ceux traditionnellement en retard comme la restauration (+89% d'adoption d'outils digitaux) ou le commerce de proximité (+67%).
Les technologies qui ont connu la plus forte croissance pendant cette période sont les solutions de travail collaboratif à distance (+215%), les plateformes e-commerce (+132%) et les outils de signature électronique (+95%). Cette adoption forcée a permis de surmonter certaines résistances culturelles préexistantes et d'ancrer durablement de nouvelles pratiques digitales. Les entreprises ayant réussi cette transition d'urgence ont rapporté des gains de productivité moyens de 22% sur les processus concernés, démontrant l'impact potentiel de la digitalisation même dans des contextes contraints.
Étude de cas : la transformation digitale de carrefour et ses résultats mesurables
Le groupe Carrefour offre un exemple éclairant de transformation digitale à grande échelle avec des résultats quantifiables. Lancé en 2018, son plan "Carrefour 2022" a placé le digital au cœur de sa stratégie avec un investissement de 2,8 milliards d'euros sur cinq ans. Cette transformation s'est articulée autour de plusieurs axes : développement du e-commerce, digitalisation de l'expérience en magasin, et modernisation de la chaîne d'approvisionnement grâce à l'IA et au big data.
Les résultats sont tangibles : le chiffre d'affaires e-commerce a été multiplié par 2,5 entre 2018 et 2022, atteignant 10 milliards d'euros. La digitalisation de la supply chain a permis de réduire les ruptures de stock de 30% et d'optimiser les coûts logistiques de 18%. Au niveau des magasins, l'introduction de caisses automatiques et d'applications mobiles a augmenté la productivité des équipes de 15% tout en améliorant l'expérience client. Cette transformation a également contribué à une réduction globale des coûts opérationnels de 3 milliards d'euros, démontrant que la digitalisation bien orchestrée peut générer des gains de productivité significatifs et mesurables.
Technologies digitales à fort impact productif
L'identification des technologies numériques à fort potentiel productif constitue un enjeu stratégique pour les organisations. Toutes les solutions digitales ne génèrent pas le même niveau d'impact sur la productivité, et leur efficacité dépend fortement du contexte d'implémentation et des objectifs poursuivis. Une étude du MIT Center for Digital Business a démontré que les entreprises combinant plusieurs technologies complémentaires obtiennent des gains de productivité 12% supérieurs à celles qui déploient ces mêmes technologies de manière isolée, soulignant l'importance d'une approche intégrée.
Les technologies les plus transformatrices en termes de productivité partagent certaines caractéristiques : elles automatisent des processus à faible valeur ajoutée, améliorent la qualité et la vitesse des décisions, facilitent la collaboration, et permettent de mieux utiliser les ressources disponibles. La sélection des solutions adaptées aux spécificités de chaque organisation devient donc un facteur déterminant de succès, nécessitant une analyse approfondie des processus existants et des opportunités d'amélioration.
Automatisation des processus robotisés (RPA) et réduction des tâches répétitives
L'automatisation des processus robotisés (RPA) constitue l'une des technologies digitales les plus efficaces pour générer rapidement des gains de productivité. Cette technologie permet d'automatiser des tâches répétitives basées sur des règles prédéfinies, libérant ainsi du temps pour des activités à plus forte valeur ajoutée. Dans le secteur financier, par exemple, les solutions RPA réduisent le temps de traitement des factures de 80% en moyenne, tout en diminuant les erreurs de saisie de 95%.
L'impact productif du RPA est particulièrement significatif dans les processus administratifs comme la gestion des commandes, le reporting financier ou le traitement des demandes clients. Une étude de Deloitte montre que les entreprises ayant déployé des solutions RPA à grande échelle constatent un retour sur investissement moyen de 15% dès la première année, avec des gains de productivité allant jusqu'à 40% sur les processus concernés. Ces automatisations permettent également d'améliorer la conformité réglementaire en réduisant les erreurs humaines et en assurant une traçabilité complète des opérations.
Intelligence artificielle et analyse prédictive pour l'optimisation décisionnelle
L'intelligence artificielle et l'analyse prédictive transforment radicalement les processus décisionnels en entreprise, augmentant ainsi la productivité des équipes dirigeantes et opérationnelles. Ces technologies permettent d'analyser rapidement d'immenses volumes de données pour en extraire des informations stratégiques et anticiper les tendances futures. Dans le secteur du retail, par exemple, les algorithmes prédictifs améliorent la précision des prévisions de vente de 30 à 50%, optimisant ainsi la gestion des stocks et réduisant les coûts associés.
L'IA décisionnelle trouve également des applications à fort impact dans l'optimisation des prix (augmentation moyenne du revenu de 3 à 8%), la détection des fraudes (réduction des pertes de 60% dans le secteur bancaire), ou la maintenance prédictive (diminution des temps d'arrêt machine de 30 à 50% dans l'industrie). Les systèmes d'aide à la décision basés sur l'IA permettent d'accélérer les cycles décisionnels de 25% en moyenne tout en améliorant la qualité des choix stratégiques, créant ainsi un double effet positif sur la productivité globale de l'organisation.
Cloud computing et fluidification du travail collaboratif
Le cloud computing s'impose comme un catalyseur majeur de productivité en transformant les modes de collaboration et d'accès à l'information. En migrant leurs infrastructures et applications vers le cloud, les entreprises bénéficient d'une flexibilité accrue, d'économies d'échelle substantielles et d'une capacité d'innovation renforcée. Selon une étude d'IDC, les organisations ayant adopté des solutions cloud matures constatent une augmentation moyenne de la productivité de leurs équipes IT de 38%, libérant ainsi des ressources pour des projets à plus forte valeur ajoutée.
L'impact du cloud sur la productivité se manifeste particulièrement dans la collaboration à distance, devenue essentielle depuis la pandémie. Les plateformes collaboratives basées sur le cloud comme Microsoft Teams, Slack ou Google Workspace réduisent le temps consacré aux réunions de 20% en moyenne et accélèrent les cycles de validation de documents de 65%. Ces solutions permettent également de briser les silos organisationnels en facilitant le partage d'information entre départements, avec à la clé une réduction de 28% du temps consacré à la recherche d'informations selon une étude de McKinsey.
Solutions ERP modernes et intégration des flux d'information
Les systèmes ERP (Enterprise Resource Planning) de nouvelle génération constituent un levier de productivité majeur en centralisant et en harmonisant l'ensemble des données et processus de l'entreprise. Contrairement aux solutions traditionnelles souvent rigides et complexes, les ERP modernes offrent des interfaces intuitives, une grande modularité et des capacités d'intégration avancées. Une étude de Panorama Consulting révèle que les entreprises ayant implémenté un ERP moderne réduisent leurs coûts opérationnels de 11% en moyenne et améliorent leur productivité administrative de 22%.
L'intégration des flux d'information permise par ces solutions élimine les ressaisies de données (gain de temps moyen de 4 heures par semaine et par utilisateur), accélère les processus transversaux comme le cycle order-to-cash
(réduction moyenne de 25% du délai), et améliore la fiabilité des reportings financiers. Les ERP cloud bénéficient également de mises à jour régulières intégrant les dernières innovations technologiques, permettant aux entreprises de rester à la pointe sans investissements informatiques lourds. Cette combinaison d'efficacité opérationnelle et de flexibilité contribue significativement à l'amélioration de la productivité globale.
Iot industriel et maintenance prédictive dans les chaînes de production
L'Internet des Objets industriel (IIoT) révolutionne la productivité des environnements de production en permettant une surveillance
continue de fournir des informations en temps réel sur l'état des équipements, permettant une optimisation proactive des opérations. Cette technologie repose sur un réseau de capteurs intelligents qui collectent des données sur les performances des machines, la consommation d'énergie, les conditions environnementales et d'autres paramètres critiques. Selon une étude de PwC, les entreprises industrielles qui ont déployé des solutions IoT à grande échelle constatent une augmentation moyenne de la productivité de 12% et une réduction des coûts opérationnels de 16%.
La maintenance prédictive représente l'un des cas d'usage les plus rentables de l'IIoT. En analysant les données collectées par les capteurs, les algorithmes d'intelligence artificielle peuvent détecter les signes précurseurs de défaillances avant qu'elles ne surviennent. Cette approche préventive réduit les temps d'arrêt non planifiés de 30 à 50% et prolonge la durée de vie des équipements de 20 à 40%. Dans l'industrie automobile, par exemple, Renault a déployé des capteurs IoT dans ses usines qui ont permis de réduire les arrêts de production de 25% et d'optimiser la consommation énergétique de 18%, avec un retour sur investissement atteint en moins de 18 mois.
Mesure et quantification des gains de productivité
La mesure précise des gains de productivité liés à la digitalisation constitue un défi majeur pour les organisations. Sans métriques fiables, il devient difficile de justifier les investissements numériques et d'orienter les efforts vers les initiatives les plus performantes. Une étude du Boston Consulting Group révèle que seulement 33% des entreprises disposent d'un cadre méthodologique rigoureux pour évaluer l'impact productif de leurs projets digitaux, ce qui explique en partie pourquoi de nombreuses transformations n'atteignent pas leurs objectifs.
L'établissement d'un système de mesure efficace nécessite une approche multidimensionnelle qui dépasse les indicateurs financiers traditionnels. Les entreprises les plus performantes en matière de digitalisation combinent des métriques quantitatives (temps économisé, réduction des coûts, augmentation du chiffre d'affaires) et qualitatives (satisfaction client, expérience collaborateur, agilité organisationnelle). Cette vision holistique permet d'appréhender l'ensemble des bénéfices générés et d'identifier les leviers d'optimisation pour maximiser le retour sur investissement digital.
Métriques et KPIs spécifiques à la performance digitale
L'évaluation précise de l'impact productif des initiatives digitales nécessite l'adoption de métriques spécifiques, complémentaires aux indicateurs de performance traditionnels. Ces KPIs digitaux se répartissent généralement en quatre catégories : efficacité opérationnelle, expérience client, innovation et agilité organisationnelle. Dans la première catégorie, on retrouve des indicateurs comme le taux d'automatisation des processus (qui mesure la proportion de tâches automatisées), le temps moyen de traitement des opérations, ou encore le coût par transaction.
Pour l'expérience client, les métriques essentielles incluent le Net Promoter Score digital (qui évalue la propension des clients à recommander les canaux numériques de l'entreprise), le taux de conversion des parcours digitaux, et l'indice de satisfaction des interfaces utilisateurs. Concernant l'innovation, les entreprises suivent généralement le temps de mise sur le marché des nouvelles fonctionnalités (time-to-market
), le pourcentage de revenus générés par les offres digitales, ou encore le nombre d'idées implémentées via des plateformes collaboratives. Enfin, l'agilité se mesure à travers la fréquence des déploiements, le temps moyen de résolution des incidents, ou la capacité à faire évoluer rapidement les ressources informatiques en fonction des besoins.
Méthode ROI appliquée aux investissements numériques
L'application de la méthode ROI (Return On Investment) aux projets de transformation numérique requiert une adaptation spécifique pour capturer l'ensemble des bénéfices générés. Contrairement aux investissements traditionnels, les initiatives digitales produisent souvent des effets indirects et à long terme qu'il convient d'intégrer dans l'analyse. Une approche structurée consiste à distinguer trois niveaux de bénéfices : les gains directs (réduction des coûts opérationnels, augmentation des revenus), les améliorations de processus (réduction des délais, diminution des erreurs), et les avantages stratégiques (amélioration de l'agilité, renforcement de la proposition de valeur).
Pour calculer efficacement le ROI digital, les organisations pionnières adoptent une méthodologie en quatre étapes. Premièrement, elles établissent une situation de référence claire (baseline
) avant le déploiement des solutions numériques. Deuxièmement, elles identifient l'ensemble des coûts associés au projet, incluant non seulement l'acquisition technologique mais aussi la formation, le changement organisationnel et la maintenance. Troisièmement, elles quantifient les bénéfices tangibles et intangibles sur une période de 3 à 5 ans. Enfin, elles appliquent des techniques d'actualisation pour tenir compte de la valeur temporelle de l'argent. Cette approche complète permet d'obtenir une vision réaliste du rendement des investissements numériques, avec un ROI moyen de 17% pour les projets de digitalisation réussis selon une étude de Forrester Research.
Analyse comparative avant/après implémentation selon le modèle DMAIC
La méthodologie DMAIC (Define, Measure, Analyze, Improve, Control), issue du Lean Six Sigma, offre un cadre rigoureux pour évaluer l'impact des transformations digitales sur la productivité. Cette approche structurée en cinq phases permet d'établir une comparaison objective entre la situation initiale et les résultats post-implémentation, tout en identifiant les leviers d'optimisation continue. Dans la phase "Define", l'organisation précise les objectifs du projet digital et identifie les processus impactés. La phase "Measure" établit une cartographie détaillée de la situation de départ avec des indicateurs de performance clairement définis.
Les phases suivantes transforment cette approche comparative en un véritable levier d'amélioration. L'étape "Analyze" identifie les causes racines des inefficacités révélées par la mesure initiale. La phase "Improve" correspond au déploiement des solutions digitales ciblant ces inefficacités. Enfin, l'étape "Control" assure la pérennité des gains de productivité en instaurant un suivi régulier des indicateurs clés. Cette méthodologie a démontré son efficacité dans de nombreux secteurs : Société Générale, par exemple, a appliqué DMAIC à la digitalisation de son processus d'ouverture de compte, réduisant le temps de traitement de 65% et les erreurs de saisie de 87%, tout en augmentant la satisfaction client de 22 points.
Calcul du coût total de possession (TCO) des solutions digitales
Le calcul du Coût Total de Possession (TCO) constitue une dimension essentielle pour évaluer la rentabilité réelle des solutions digitales. Cette approche dépasse la simple considération des coûts d'acquisition pour intégrer l'ensemble des dépenses associées sur la durée de vie complète de la solution. Le TCO d'une transformation digitale comprend généralement cinq catégories de coûts : l'acquisition initiale (licences, matériel, développement), l'implémentation (intégration, migration des données, personnalisation), la formation et l'accompagnement du changement, l'exploitation (maintenance, support, hébergement), et les coûts liés à l'évolution de la solution.
L'analyse TCO révèle souvent des surprises importantes pour les décideurs. Par exemple, pour les solutions ERP, les coûts d'acquisition ne représentent en moyenne que 25% du TCO sur 5 ans, tandis que les coûts d'intégration et de personnalisation peuvent atteindre 40%. Dans le cas des plateformes cloud, l'ajustement des ressources en fonction des besoins réels peut réduire le TCO de 30% par rapport aux estimations initiales. À l'inverse, la sous-estimation des besoins de formation peut augmenter le TCO de 15 à 20%. La maîtrise de cette métrique complexe permet d'optimiser les choix technologiques et de maximiser le rapport entre productivité générée et investissement global, contribuant ainsi à une transformation digitale économiquement viable sur le long terme.
Facteurs clés de succès d'une digitalisation productive
La réussite d'une transformation digitale créatrice de valeur repose sur un ensemble de facteurs interdépendants qui vont bien au-delà de la simple sélection technologique. Les organisations qui parviennent à générer des gains de productivité significatifs partagent plusieurs caractéristiques communes : une vision stratégique claire articulée autour d'objectifs business précis, un leadership engagé capable de porter le changement à tous les niveaux, et une culture organisationnelle propice à l'innovation et à l'apprentissage continu. L'étude "Digital Champions" de PwC révèle que les entreprises leaders en matière de digitalisation productive sont 2,5 fois plus susceptibles d'aligner parfaitement leur stratégie numérique avec leur vision d'entreprise globale.
L'approche centrée sur l'humain constitue un autre facteur déterminant. Les transformations les plus réussies placent les utilisateurs – qu'il s'agisse des collaborateurs ou des clients – au cœur de la démarche, en impliquant activement les parties prenantes dès les phases de conception. Cette co-construction favorise l'adoption des nouvelles solutions et maximise leur impact productif. Par ailleurs, l'agilité méthodologique s'impose comme un prérequis, avec des déploiements itératifs permettant d'ajuster rapidement les solutions en fonction des retours terrain. Cette combinaison d'alignement stratégique, d'engagement humain et de flexibilité opérationnelle crée les conditions optimales pour une digitalisation génératrice de productivité durable.
Obstacles et limites à l'efficacité de la transformation numérique
Malgré son potentiel considérable, la transformation numérique se heurte à plusieurs obstacles qui peuvent compromettre les gains de productivité attendus. Ces freins, souvent sous-estimés lors de la planification des projets, expliquent pourquoi de nombreuses initiatives digitales n'atteignent pas leurs objectifs. Selon une étude de Gartner, 87% des dirigeants considèrent la transformation digitale comme une priorité stratégique, mais seulement 40% des organisations parviennent à générer les bénéfices escomptés. Ce décalage entre ambition et réalisation s'explique par divers facteurs, tant humains que techniques ou organisationnels.
La complexité inhérente aux projets de transformation constitue un défi majeur. L'interdépendance des systèmes, la nécessité d'intégrer des technologies hétérogènes et l'évolution constante des solutions digitales créent un environnement difficile à maîtriser. Par ailleurs, la sous-estimation des dimensions non-technologiques (changement culturel, adaptation des processus, développement des compétences) conduit fréquemment à des déceptions. Pour surmonter ces obstacles, les organisations doivent adopter une vision holistique de la transformation, reconnaissant que la technologie n'est qu'un des leviers d'une digitalisation réellement productive.
Phénomène de surcharge informationnelle et paradoxe de productivité
Le paradoxe de productivité numérique désigne un phénomène contre-intuitif où l'augmentation des investissements technologiques ne se traduit pas par des gains de productivité proportionnels, voire conduit à une diminution temporaire de l'efficacité opérationnelle. Ce phénomène, d'abord observé par l'économiste Robert Solow dans les années 1980 ("On voit des ordinateurs partout, sauf dans les statistiques de productivité"), persiste dans certaines transformations digitales contemporaines. L'une des principales causes réside dans la surcharge informationnelle générée par la multiplication des outils et des flux de données.
Des études récentes montrent qu'un collaborateur moyen utilise entre 8 et 12 applications différentes dans sa journée de travail, générant jusqu'à 10 000 notifications annuelles. Cette fragmentation de l'attention réduit la capacité de concentration et peut diminuer la productivité cognitive de 20 à 40% selon des recherches du MIT. Par ailleurs, la surinformation peut paralyser la prise de décision : une étude de Gartner révèle que 65% des managers estiment que la quantité de données disponibles complique leurs processus décisionnels au lieu de les faciliter. Pour contrer ce phénomène, les organisations pionnières mettent en place des stratégies d'hygiène digitale, implémentent des outils d'agrégation et de filtrage intelligent de l'information, et développent les compétences de gestion de l'information de leurs collaborateurs.
Résistance au changement et déficit de compétences numériques
La résistance au changement constitue l'un des obstacles les plus persistants à l'efficacité des transformations digitales. Ce phénomène, profondément ancré dans la psychologie humaine, se manifeste par diverses formes d'opposition passive ou active aux nouvelles pratiques numériques. Selon une étude de McKinsey, 70% des programmes de transformation échouent principalement en raison de résistances humaines plutôt que de difficultés techniques. Cette résistance s'explique notamment par la crainte de l'obsolescence professionnelle, l'attachement aux méthodes éprouvées, ou encore l'anxiété face à des outils perçus comme complexes.
Cette résistance est amplifiée par un déficit généralisé de compétences numériques. L'enquête European Digital Skills Survey révèle que 42% des travailleurs européens ne possèdent pas les compétences digitales de base nécessaires à leur environnement professionnel. Ce déficit concerne non seulement les compétences techniques (utilisation des outils, analyse de données), mais aussi les compétences comportementales (agilité, apprentissage continu, collaboration virtuelle). Les organisations qui surmontent efficacement ces obstacles combinent plusieurs approches : impliquer les utilisateurs dès la conception des solutions, déployer des programmes de formation adaptés aux différents profils, valoriser les ambassadeurs internes du changement, et adapter progressivement les modes de travail pour faciliter la transition. L'entreprise Saint-Gobain, par exemple, a multiplié par trois l'adoption de ses nouvelles solutions digitales en déployant un réseau de 150 "digital champions" chargés d'accompagner leurs collègues et de recueillir leurs retours.